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QUI C'EST CE JOUIBRULANCE?.....
By CHANJOUISSON in Home on 5 November 2025 à 23:49
La Jouibrulance
Il y avait dans son cœur une braise qui refusait de s’éteindre.
On l’appelait la jouibrulance — ce feu étrange qui mêle le plaisir à la cicatrice.
Chaque fois qu’elle riait, un souvenir brûlait derrière ses yeux.
Chaque fois qu’elle pleurait, une lumière naissait dans sa poitrine.Elle avait passé sa vie à se retenir, à être sage, douce, polie.
Mais le jour où elle a dit non, ce n’était pas un refus — c’était une naissance.
Un cri de chair et de flamme.
Elle ne voulait plus plaire, elle voulait vivre.Alors elle a marché pieds nus dans la pluie,
a laissé le vent effacer les noms qu’on lui avait donnés,
et dans son ventre est monté un rire incandescent.
Ce n’était ni joie, ni colère.
C’était la jouibrulance — ce point exact où la douleur devient lumière.Depuis, on dit qu’elle ne cherche plus le bonheur.
Elle cherche le feu juste — celui qui brûle sans détruire,
celui qui éclaire les nuits où l’on apprend enfin à être soi.JOUIBRULANCE — Partie II : L’Homme aux Rires Forcés
Il est arrivé un matin, comme un sourire de trop dans une pièce déjà pleine.
On l’appelait L’Homme aux rires forcés.
Partout où il allait, il voulait que les gens s’embrasent, qu’ils rient, qu’ils brillent — même quand leurs cœurs avaient besoin de silence.
Il disait :« La vie, c’est fait pour jouir, pas pour penser. »
Mais les regards autour de lui se vidaient.
Il confondait la lumière avec les projecteurs,
et la chaleur avec la brûlure.Elle, celle qui portait la jouibrulance, l’a regardé longtemps.
Elle a vu dans ses gestes la peur de son propre vide.
Alors elle lui a dit doucement :« On ne sauve personne en le forçant à ressentir. La joie n’a de sens que quand elle naît d’un consentement. »
Il n’a pas compris tout de suite.
Mais dans ses yeux, un doute a commencé à trembler.
Peut-être que la vraie intensité n’est pas d’enflammer les autres,
mais d’apprendre à contenir son propre feu.— Partie III : L’Homme du Feu Trompeur
Il se croyait porteur de lumière.
Il disait qu’il voulait « éveiller les âmes », qu’il connaissait le chemin vers les étoiles.
Mais ce qu’il offrait, c’était un feu trop violent, un feu qui consume avant d’éclairer.Il aimait voir les yeux briller, sentir les souffles s’accélérer,
comme si chaque éclat de plaisir prouvait son pouvoir sur le monde.
Mais en vérité, il ne cherchait pas la joie des autres —
il fuyait son propre vide.Elle, la femme de la jouibrulance, l’a compris.
Elle savait que la vraie flamme n’est pas celle qu’on impose,
mais celle qui se partage, fragile et consentie.Alors elle a posé sa main sur son cœur et lui a dit :
« Ton feu n’éveille personne, il les brûle. Apprends à aimer sans conquérir. »
Ce jour-là, il a vu le ciel autrement —
non plus comme un lieu à atteindre,
mais comme un espace à respecter.L— Partie IV : Le Jouisseur
On disait de lui qu’il vivait pour le frisson.
Toujours à la recherche d’un regard, d’un éclat, d’une promesse.
Il croyait connaître le plaisir, mais il ne connaissait que la conquête.
Chaque sourire était pour lui une porte à forcer,
chaque silence, un défi à rompre.Il s’appelait le Jouisseur,
mais sous ses rires brillait la peur du vide.
Il n’aimait pas les femmes, il aimait leur lumière —
celle qu’il voulait attraper, même pour un instant.La femme de la Jouibrulance, elle, le regardait avec une tendresse triste.
Elle savait que derrière son masque d’assurance,
il ne cherchait pas le corps des autres — il cherchait le sien.Alors, au lieu de le repousser, elle lui a dit :
« Le vrai plaisir n’est pas de prendre, mais de se laisser toucher — sans masque, sans peur. »
Et pour la première fois, il s’est tu.
Peut-être qu’à cet instant, il a senti ce qu’il cherchait depuis toujours :
non la brûlure du désir,
mais la chaleur simple d’une présence vraie.La poussière qu’il laisse
Il avait le pas lisse des gens qui ne portent rien sur eux que leur certitude.
Ils l’appelaient le Jouisseur parce qu’il avait fait du désir une industrie et de la séduction un outil.
Il entrait dans les pièces comme on allume un néon : sûr que la lumière allait se courber à sa volonté, sûr que les reflets qu’il dérangeait prouveraient sa grandeur.Il avait appris à repérer les fissures : une hésitation dans la voix, un genou qui ne serre pas assez, des dents qui montrent trop vite un sourire.
Il y allait, méthodique, comme un homme qui nettoie pour mieux tâcher ensuite.
Il aimait l’idée de souiller — pas physiquement, non, il ne s’intéressait pas à la saleté ordinaire — mais à ce qui rend les gens transparents, à ce qui fait qu’on baisse la garde et qu’on se croit moins.
Il appelait ça offrir du plaisir ; ceux qui regardaient de loin voyaient des rires, des regards brillants, une soirée réussie. Mais ce qu’il laissait derrière lui, c’était autre chose : une poussière fine, comme la suie déposée par une lampe qu’on a trop longtemps tenue trop près d’un visage.Les premières à le remarquer furent silencieuses. Elles se cherchaient des raisons à voix basse : fatigue, malentendu, la boisson peut-être. Mais la poussière restait. Sur leurs vêtements, dans leur regard, sur leurs souvenirs. Elles se sentaient plus lourdes, comme si on leur avait cousu derrière la nuque un petit sac de honte.
Il était tel un vent qui promet la chaleur et qui apporte la morsure. Il promettait d’ouvrir des portes et il en refermait d’autres, sans bruit.Il parlait d’éveil, d’expériences, de libertés. Ses phrases étaient des invitations qui devenaient des lois sans qu’on s’en rende compte. Il nommait le consentement avec des mots camouflés, transformant la réticence en « timidité » à surmonter, la douleur en « sensibilité » à dompter.
Il abusait des mots, il violait le sens même des mots.
Et quand quelqu’un protestait, il souriait comme on feint une panne d’électricité : le visage immobile, l’électricité coupée, et la pièce se remettait à fonctionner à son rythme.Parce qu’il n’était pas seulement prédateur ; il était spectacle. Il aimait voir la trace qu’il laissait — non pas le souvenir d’un moment partagé, mais la marque d’un pouvoir exercé. Il collectait ces marques comme on collectionne des timbres : signatures invisibles sur des vies qu’il considérait comme des pages blanches à noircir.
Il se disait généreux : il donnait des sensations. Mais le don qu’il croyait distribuer était un racket, une taxe sur la confiance.Les victimes, d’abord, se taisaient parce que la honte était plus rapide que la parole. Elles cherchaient des excuses, réparent le monde pour qu’il continue d’avoir du sens. Elles se réfugiaient dans des gestes de normalité et s’adaptaient au poids qui pesait désormais sur leur poitrine. Certaines se mirent à mentir à elles-mêmes, se persuadant qu’il n’y avait pas eu contrainte, seulement une erreur de lecture, une maladresse. Mais la poussière, elle, ne se laisse pas convaincre.
Puis il y eut la génération de ceux qui regardaient la poussière et qui décidèrent de la prendre en photo.
Ils parlèrent, d’abord à voix basse, puis plus fort : des récits qui s’alignèrent comme des pierres sur un chemin. Ils dirent l’étrange alchimie de ses compliments, la rapidité de ses glissements dans les confidences, la manière dont il retournait les refus en invitations. Ils rendirent compte de la transformation : comment la joie promise se muait en cloison.
Le Jouisseur protesta : « On me calomnie », dit-il, le rire coupé net, incapable d’entendre que le monde avait changé. Il fit ce que font souvent les gens qui ont alimenté leur pouvoir d’illusions — il nia, minimisa, insulta, puis tenta de contraindre.Mais dès le premier récit publié, d’autres voix suivirent. Elles formaient un chœur qui n’était plus seulement plaintif : il était revendication. Elles racontèrent non pas les détails crus d’actes privés, mais la mécanique saccagée qui avait transformé leurs désirs en monnaie. Elles racontèrent la froideur de se reconnaître instrumentalisées, la rage d’avoir été regardées comme des trophées, non comme des personnes.
Et à mesure que ces paroles s’accumulaient, la poussière se fit visible. Ce qui était avant une nuance devint une tache, puis une tâche dénoncée. Le monde qui autrefois applaudissait son panache dut regarder.Il y eut enquête, mots sur papier, convocations, témoins. Le Jouisseur y trouva d’abord la colère, puis l’impuissance. Il n’y avait pas une seule scène à condamner, seulement une méthode, un style. Mais les styles aussi peuvent être jugés. Le tribunal de l’opinion, plus cruel encore que le tribunal, sut faire ce que la loi, souvent lente, fait mal : nommer le mal et montrer ses effets.
Son image se fissura. Les soutiens s’égrenèrent comme des perles qu’on laisse tomber. La poussière qu’il laissait sur les autres retomba en retour sur lui, plus lourde, plus dense.Les plus importantes des victoires furent minuscules. Une femme retrouva sa capacité à poser un regard sans y lire une attente. Un homme réapprit à tenir la main de celle qu’il aimait sans avoir peur d’être comparé. Une autre trouva le courage d’écrire, et d’affirmer que son corps et sa parole ne sont pas des domaines publics à piller.
Ils recommencèrent à signer leurs jours de leur nom, et non d’un adjectif imposé par quelqu’un d’autre.Quant à lui, le Jouisseur, il resta, un temps, dans une chambre pleine d’échos. Il apprit que la séduction qui nie l’autre finit par creuser un tombeau pour soi. Peut-être apprit-il. Peut-être que non. Certaines fins sont comme des fenêtres ouvertes sur un vide : on voit l’extérieur mais on ne s’y risque pas.
Ce que les pierres du chemin disaient, c’était que la réparation est lente et que la mémoire est tenace. Les traces étaient là pour rappeler que la liberté des uns ne peut se construire sur la dépossession des autres.Dans les cafés, dans les lignes sur un blog, dans la façon qu’ont les gens maintenant de demander « est-ce que tu veux ? », quelque chose avait changé. Les mots revinrent à leur place : consentement, respect, présence. Ce n’est pas un triomphe grandiose — c’est plus petit, plus concret : une porte qui s’ouvre quand on la pousse, un regard qui ne punit plus, une main qui n’exige pas.
La poussière, on l’enlève au chiffon, on lave, on gratte. Mais il reste cette mémoire tactile : ce qu’on a senti collé à la peau, la façon dont on s’est débattu et comment, affaibli au départ, on a appris à se tenir droit.
Et quand la nuit descend encore sur la ville, ceux qui ont connu la salissure savent une vérité toute simple et terrible : on peut salir quelqu’un, on peut tenter de le réduire, mais on ne peut pas effacer la capacité de celui qui a été touché de décider à nouveau.
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